Sherlock Holmes
est à la mode sur petit et grand écran. Le regain d'intérêt pour le détective
victorien le plus célèbre du monde vient notamment du triomphe de la série
médicale américaine de la Fox le fameux "Dr House" (2004-12),
copié-collé du personnage de Holmes appliqué à la médecine moderne (et incarné magistralement à l'écran par Hugh Laurie qui était jusque là habitué aux rôles de
grand benêt !)."Dr House" lui-même repompé très rapidement dans
"Lie to me " (2009-11) toujours pour la Fox, où cette fois notre "Holmes"
est un expert dans la détection de mensonges par l'analyse de «
micro-expressions » (incarné par un autre grand acteur anglais Tim Roth) et qui
aide la police à résoudre des crimes.
En 2009, Guy
Ritchie modernise le mythe pour Hollywood, essentiellement via des personnages
dépoussiérés et une réalisation très fashion, mais ne sort pas Holmes de la
période victorienne (par contre il en livre une version très disneyenne).
Coté anglais, les
Britanniques ne sont pas assez fous pour laisser tomber une telle mine d'or.
Tout le monde se souvient de la version télé multi diffusée, très respectueuse
et consciencieuse "Sherlock Holmes" (1984-94) produite par Granada
Television pour ITV avec Jeremy Brett dans le rôle principal.
Difficile depuis
de repartir dans une nouvelle adaptation télévisée classique vu que la série
avec Brett continue de faire référence. Il n'est donc guère étonnant que Steven
Moffat et Mark Gatiss, deux génies de la télévision britannique, également fans
de Sherlock Holmes mais aussi de la série mythique de SF de la BBC Dr Who, et
qui ont participé au renouveau de cette dernière en écrivant plusieurs épisodes
depuis sa renaissance en 2005, aient choisi une direction différente.
"Sherlock"
est apparue sur les écrans de la BBC fin juillet 2010. Il s'agit d'une
adaptation libre mais assez respectueuse des aventures de Sherlock Holmes,
replacées dans un Londres moderne. On y
retrouve les personnages principaux du mythe (Watson, Moriarty, Mycroft,
Lestrade, MMe Hudson,...). Le projet bénéficie d'une production luxueuse, d'un
casting d'enfer (Benedict Cumberbatch et Martin Freeman) et... de temps (les
saisons se constituent seulement de 3 épisodes de 90 mn). Si l'écriture est
donc due à deux grands de la télévision anglaise, la réalisation se veut
également très léchée et non paresseusement en retrait par rapport à l'écriture
et se contentant d'une simple mise en images de dialogues finement ciselés
(fait souvent reproché à la télévision britannique).
"Sherlock"
n'est pas dénué d'imperfections. Comme dans le "Dr Who" version
Moffat (ce dernier est showrunner de la série depuis 2011), la série a tendance
à vouloir survendre au téléspectateur à quel point il est en train de regarder
une série hors norme et ultra intelligente. Bref, dans Sherlcok, il y a
beaucoup de brillance... un peu trop consciente d'elle-même. Quitte à perdre le
téléspectateur en l'assommant à coups de génie sur-gonflé et de prétention
quasi hystérique. Les 90 mn peuvent parfois paraître un peu longues.
"Elementary",
de son coté, est également une relecture moderne des aventures de Sherlock
Holmes mais balancée de l'autre côté de l'Atlantique en septembre 2012 sur CBS.
D'ailleurs les producteurs ont d'abord contacté ceux de Sherlock début 2012
pour voir s'ils pouvaient obtenir des droits d'adaptation de la nouvelle série
de la BBC pour la télé américaine. Finalement, ils décideront de partir dans
une direction totalement différente. Et pas seulement parce qu'Elementary est
situé à New York.
Non ici, on prend
juste le concept du personnage de Holmes (un peu comme dans "House"
et "Lie to me" mais avec des références plus visibles et surtout le même
nom !) qu'on lance dans de toutes nouvelles aventures qui n'ont rien à voir
avec celles écrites par Conan Doyle. Holmes est un jeune fils de famille aisé,
évidemment génial et égocentrique (joué par un Johnny Lee Miller pas nul mais
pas brillant non plus), qui après quelque temps passé à Londres à se droguer et
à aider Scotland Yard, rentre à New York où son père lui assure un toit tant
que celui-ci accepte d'être aidé par un coach... le fameux Watson. Sauf qu'ici
Watson est une femme sexy d'origine asiatique (incarnée par Lucy Liu célèbre
pour sa participation à "Ally Mc Beal" ou aux films "Kill
Bill" et "Charlie et ses drôles de dames"), ex-médecin très douée qui a
décidé d'arrêter la médecine suite à une erreur qui a entraîné le décès d'un
jeune patient. Et le reste des personnages des aventures originales de Sherlock
Holmes brillent par leur complète absence (en tout cas aux 3/4 de la première saison).
Nous avons
bien affaire à une énième variation de Holmes, génial et caractériel, retranscription classique
du personnage de Conan Doyle. Mais qui du coup peine à se distinguer de... Dr
House. Bref on a plutôt l'impression d'assister aux aventures d'un jeune Dr
House détective privé et non plus médecin. On est dans de la
télévision américaine ultra classique, croisement de Dr House et de NCIS. Ni
plus ni moins. Et Johnny Lee Miller n'étant ni Hugh Laurie, ni Tim Roth, il
reste à voir si les téléspectateurs suivront la série sur la durée.
Il est amusant de
voir que "Elementary" et "Sherlock" sont tous deux quelque
part des cas d'école représentant deux types de télévision bien différents mais
loins d'être nouveaux. "Elementary" représentant la série classique
des grands networks américains (un concept simple et efficace mais un manque
d'audace se reposant trop sur utilisation de
recettes qui ont déjà fait leurs preuves) et une tendance britannique à
s'auto-référencer et à revendiquer une ambition de brillance qui ne fait pas
toujours mouche. Dans les deux cas, le risque d'indigestion est loin d'être à
écarter, et votre tolérance risque en partie de dépendre de la tolérance de
votre estomac à ces deux extrêmes.
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